Réédition de Rashômon, de Akira Kurosawa (1950).
A ceux qu’agacerait mon insistance à
parler en toute occasion de mise en scène
au sens le plus classique du terme, je ne saurais trop conseiller d’aller voir
(ou revoir) le Rashômon de Kurosawa
qui vient tout juste d’être réédité. On me rétorquera, non sans raison, que je
ne prends guère de risques avec Kurosawa, pas plus que je n’en prendrais, dans
de tous autres registres formels, avec Mizoguchi ou Ozu ; et j’en prends
d’autant moins que Kurosawa est sans doute le plus « occidental » des
cinéastes nippons, tant sur le fond, quand il adapte plus ou moins directement
Shakespeare, Dostoievski ou Gorki, voire des romans noirs, de Hammett (« La
Moisson rouge » a largement inspiré Yojimbo/Le
Garde du corps, 1961) à Ed McBain (pour Entre
le ciel et l’enfer, 1963), que sur la forme, avec notamment un montage
extrêmement dynamique -- et jusqu’à une curieuse utilisation du
« Boléro » de Ravel. Il est frappant de voir la profonde influence
qu’il a exercée en retour sur nombre de cinéastes occidentaux, et s’il est de
notoriété publique que Star Wars et
ses suites portent son empreinte[1]
(au-delà même de la silhouette de Dark Vador), à revoir Rashômon, on comprend tout ce qu’un Sergio Leone lui doit -- et
pas seulement le sujet de Yojimbo
(que démarque Pour une poignée de dollars),
lui-même reprenant il est vrai le canevas de « La Moisson rouge »,
mais aussi son goût pour des cadres soigneusement composés et jouant habilement
sur l’utilisation de l’espace, le placement des acteurs et la profondeur de
champ.